jeudi 30 janvier 2014

De Malawa à La Paz

 
Quittant Sucre pour Malawa, petit village de tisserands, situé dans un cratère de 8 km, nous commençons par grimper en camping-car à 3700m, tout sur piste, pour apercevoir ce paysage majestueux aux alentours :




Ensuite la descente, puis la galère : au dernier message, j’avais écrit que la plus mauvaise piste était dernière nous et bien non : elle est là, droit devant, toute défoncée par les innombrables pluies des derniers jours. Les bus ne passent plus mais vous connaissez Bernard : lui veut passer ! J’ai parfois l’impression qu’il pense conduire un 4x4.
Piste empruntée

Eh non, Léonce ne passe pas et nous rebroussons chemin. Sauf que voulant prendre un bolivien en stop, nous calons. Avec de l’élan, nous finissons par redémarrer puis une pente un peu trop raide et là, c’est le blocage total : le camping-car est out et heureusement, un 4x4 nous dépanne et tandis que je remonte à pied avec Douchka, Léonce et Bernard se font remorquer et vont se garer sur un terrain de foot … éventuel terrain de décollage, s’il y a un peu de vent, vu l’altitude.
Notre remorqueur du moment

Le lendemain, nous décidons d’aller au village à pied. Douchka saute de joie. Sur notre chemin, nous rencontrons Lucia et sa fille qui reviennent de Sucre où elles ont vendu leurs récoltes : 2h de bus + 2h à pied pour rentrer chez elles, le balluchon rempli de victuailles que Lucia porte sur son dos, puisqu’elles vont une fois par semaine à la ville. 
Lucia et sa fille
 Lucia nous dit qu’il y a encore 2h de marche quand nos chemins se séparent et qu’elle et sa fille grimpent en haut de la montagne pour retrouver leur maison.


Nous mettrons 4h : au début ballade tranquille sur une piste, 

Pont installé depuis 1 an


puis chemin de plus en plus escarpé et parfois au bord du vide mais les paysages sont fabuleux 


chemin glissant au bord du vide
 et, arrivés presque au sommet, nous croisons des enfants qui ont confectionné des bracelets pour les vendre aux touristes.
Les montagnes en arrière-plan sont les contours du volcan


A notre arrivée au village de Malawa, nous croisons un groupe de touristes avec guide mais nous les coiffons au poteau et trouvons un peu plus loin, un gamin qui nous attend et nous montre la maison où nous passerons la nuit : nous qui nous imaginions déjà dormant à même la terre avec pour seule protection nos anoraks, nous sommes soulagés. D’ailleurs, plein d’espoir dans ce village qui compte tout au plus une dizaine de maisons, Bernard m’avait dit : « on va chercher un bed and breakfast » J’ai bien ri mais il a raison.
Un vrai bed&breakfast !

Pour 7€ chacun, nous avons le dîner, le couchage et le petit déjeuner (eau chaude sucrée + 2 beignets chacun). Avec le gamin qui nous apporte du bois pour le feu du soir : nous sommes comblés !

La bonne soupe ...

au coin du feu et ...

une petite bière pour la route et ...

notre dîner : oeuf poché + pâtes et pommes de terre

Le plus drôle de cette histoire, c’est que nous sommes venus à Malawa pour voir des tisserands AUTHENTIQUES, mais de tisserands, il n’y en a point. Peut-être à cause des vacances scolaires ? on ne sait pas.
Le lendemain, partis à 7h, nous prenons l’autre piste cette fois, plus longue mais moins dangereuse, surtout qu’il pleut. 
Presque dans les nuages
 Nous espérons arriver suffisamment tôt pour déjeuner à Sucre et tester un dernier bon restaurant. Notre marche dure 3h30, tranquille et nous croisons Cyril et son frère qui se rendent au même endroit que nous pour attendre le bus. 
Cyril

et son frère

















On leur promet d’imprimer leurs portraits mais en arrivant au camping-car, le terrain de foot est tout trempé et nos pieds s’enfoncent dans la terre. Et pas que nos pieds : le camping-car aussi !

Bernard essaie les pierres, de relever Léonce avec le crick pneumatique qui explose dès les premières secondes, puis le crick manuel qui s’enfonce dans la boue, mais rien n’y fait. Un 4x4 s’arrête et les hommes ne voulant pas s’embourber se contentent de lui donner des conseils, mais c’est pire. Enfin, la pluie s’arrête, le sol commence à être moins imbibé et un camion rempli de personnes s’arrête. Le camion ne peut descendre sur le terrain de foot mais les hommes (une dizaine) se proposent de tirer avec la corde le camping-car et ça marche ! 

Ensuite, le camion remorque Léonce pour les derniers mètres et nous sommes sortis d’affaire. Nous avons bien cru rester jusqu’à l’assèchement du terrain. 

Une dame me fait le signe de la croix et tout le monde remonte dans le camion. Merci de votre entraide Messieurs les boliviens !
Etat du terrain de foot après le passage de Léonce ...
 Mais après toute cette pluie, Léonce va-t-elle pouvoir grimper cette piste toute détrempée ? Le suspens est à son comble. Personne ne parle dans la cabine et Douchka scrute la piste aussi attentivement que nous. On ne pense plus au restaurant mais surtout à ne pas rester embourbés. Heureusement, avec tout le temps qu’il a fallu pour sortir Léonce du terrain de foot, la piste a eu le temps de sécher et la grimpette se fait sans encombre.
Nous arrivons à Sucre à 14h, nous vérifions que le restaurant sert toujours puis nous prenons une bonne douche et changeons de costumes :
Après la douche et changement de "costumes"
 Après ce bon moment, point de répit : il faut à nouveau changer le caoutchouc d'un des cardans qui n’a pas tenu. Alors Bernard se met à la recherche d’un mécano, qu’il trouve au bout d’ 1 heure, puis nous retournons à notre place habituelle, prêts pour la nuit.
Le lendemain, dernière ballade dans la ville ensoleillée, retournant à la Posada où nous avions si bien mangé :
Dernier tour dans la ville pour les achats d'alpaga

Restaurant en plein air

Jolis sourires de Sucre ...


Retour à notre restaurant préféré à Sucre : La Posada
L’après-midi, départ pour Potosi et l’Altiplano donc 4000m d’altitude.
La montée est vertigineuse et ensuite, le plateau à 3500m est surprenant.
A Potosi, nous cherchons à remplir notre bouteille de gaz argentine et cédons la brésilienne, Bernard trouve un endroit pour réparer la bicyclette et le camping-car. Le mal de l’altitude se fait sentir dès le lendemain : mal de tête, épuisement rapide, nez bouché et difficulté pour respirer. La ville est bruyante et chaque pas est pesant :
Groupe folklorique

Marchande dans la rue avec son bébé

Bouchère

Marchand en pleine discussion

Vendeuse de feuilles de coca


Les bébés toujours dans le dos
 Bernard se renseigne auprès d’une agence de tourisme car il veut visiter une mine encore en activité.
Le lendemain, il part de bonne heure, me laissant « agoniser » dans le lit.
Potosi : 150.000 habitants, 4000m d’altitude, fût l’une des villes les plus riches du monde à partir du 16ème siècle et pour les 3 qui ont suivi, grâce à ses mines d’argent qui ont permis à la cour espagnole de prospérer.
Visite des mines de Potosi : Texte de Bernard

Nous nous retrouvons 9 à visiter les mines avec Big Deal Tours:
1 couple de Californiens, 1 couple d'Irlandais, 1 allemand, 3 françaises et moi.
Nous embarquons dans un mini-bus qui nous emmène au marché des mineurs: c'est ici qu'ils viennent faire leurs emplettes avant d'aller bosser:
des feuilles de coca pour tenir le coup dans ces conditions de travail épouvantables, des bouteilles de limonade, des cigarettes, des bâtons de dynamite, leur mêche avec détonateurs (2mn avant le boum) et le nitrate d'ammonium (pour bourrer le trou) : un baton de dynamite et son détonateur coûte 2€ et permet de faire un trou d'1m3 dans la roche.
Notre guide avec son bâton de dynamite

Le Cerro Rico ( le Mont Riche) appelé ainsi car les veines d'argent quasi pur qui y ont été découvertes au 16ème siècle ont enrichi l'Espagne (et par ricochet toutes les cours d'Europe) pendant 3 siècles.

8 millions d'esclaves ou d'indiens y ont péri pour exploiter ces mines d'argent; Potosi était alors la ville la plus riche du monde.
 
Actuellement la mine produit surtout des roches contenant 85% d'impuretés et 15% d'un mélange de minerais (argent, zinc, plomb principalement).
Les roches sont traitées sur place dans une usine de séparation qui utilise moults produits chimiques (acide, cyanure,....) pour extraire les 15% intéressants qui sont envoyés par train au Chili puis par bateau dans tous les pays du monde entier :
machines pour séparer les minerais


180 coopératives (soit 10.000mieurs) se partagent l'exploitation des mines.
Chaque coopérative regroupe des mineurs qui travaillent en petits groupes d'une dizaine de personnes sur une galerie précise. Certains font pêter la roche (ils possèdent des foreuses alimentées par des tuyaux d'air comprimé ce qui leur permet de faire des trous pour y placer les bâtons de dynamite, leur détonateur, le nitrate d'ammonium et BOUM...) :
l'équipe de mineurs placent la dynamite

ils se bouchent les oreilles avant explosion

 















d'autres fragmentent au marteau les roches dégagées pour examiner la qualité des échantillons, les derniers évacuent les roches dans des sacs de toile vers l'extérieur, soit en brouettes (5 sacs de 35kg  dans une brouette...! à pousser dans des galeries hautes d'un mètre sur plusieurs centaines de mètres de montée...) :
Gamin de 14 ans soulevant un sac de 35kg

Ancienne galerie de l'époque coloniale


J'ai essayé à l'arrêt de soulever une brouette et j'avais dur à la stabiliser !
L'air dans les galeries est saturé de poussières provoquant la silicose chez les mineurs (affection pulmonaire qui tue les mineurs en 15 ans en moyenne).
Stalactites de sulfate de cuivre

Les mines ont d'abord appartenus à des personnes privées, puis ont été privatisées et sont actuellement louées aux coopératives.

Les mineurs qui cotoient la mort au jour le jour (une dizaine de morts par an) sont superstitieux et vouent un culte à Tio (oncle), le diable sous la terre (par opposition à Pachamama, la mère sur la terre) :
Tio, l'oncle et le diable sous la terre

Chaque mine possède ainsi une représentation de Tio, figure diabolique, auquel il vont faire des offrandes (feuille de coca, cigarette, alcool à 96°) en fin de semaine; réunis autour du Tio, ils mâchent des feuilles, trinquent à sa santé et répandent un peu d'alcool sur Tio et par terre (pour Pachamama). Cette dualité  est toujours respectée (on picole 2 fois, on répand des feuilles de coca 2 fois, etc...).
Bernard et son guide

Après sa visite de la mine, Bernard récupère le vélo et nous quittons la ville, espérant trouver un endroit pour dormir à une altitude moindre.
Au départ, nous descendons à 3400m mais, petit à petit, nous remontons inlassablement, avec une pointe à 4300m et nous nous arrêtons la nuit tombée à 4200m d’altitude. Le lendemain matin, nous découvrons une église en terre abandonnée, des femmes et des enfants ramassant des herbes :

Et Léonce fumant à fond au démarrage … on commence à se poser des questions sur des réparations plus sérieuses concernant le camping-car ! Mais après 4 essais, nous repartons sur la route en direction d’Oruro, autre ville minière.

Sur la route, nous croisons nos premiers lamas :


Après la Patagonie, où Douchka poursuivait les guanacos, elle est ravie de courser les lamas :

Mais eux aussi la prennent en chasse :


 L'Altiplano comme on se l'imagine :


L’arrêt à Oruro sera courte car Bernard pense que le joint de culasse n’est pas loin de lâcher. Alors devant cette perspective et ne connaissant pas la route, nous préférons aller rapidement à La Paz, trouver un bon mécano et les pièces nécessaires.
Léonce le ventre à l'air
 Depuis le 24 janvier, nous sommes donc coincés à La Paz, où il pleut et fait 10° la plupart du temps.
Nous sommes immobilisés en face du garage qui a démonté le moteur du camping-car, à 200m de la piste de l'aéroport de La Paz. Heureusement, grâce au voisin, nous pouvons utiliser son électricité le soir et chauffer un peu. Nous attendons le joint de culasse qui doit arriver de France lundi prochain ... Inch' Alla !